Articles

Au fond de ta bulle

Margaux, ma chérie, le cœur lourd, je t’écris depuis notre salon. Nous sommes le 19 décembre. Noël approche et je t’observe dans l’une des boules de notre sapin. Tu sembles confortablement installée dans ta bulle. Je me souviens du jour où cette photo a été prise. Du haut de tes trois mois, ta musculature était déjà bien développée. Toute fière, tu relevais ton torse pour décoller les épaules et la tête de ton transat.  

Noël approche et une fois de plus je ne verrai pas ton beau visage s’illuminer face à la guirlande lumineuse. Noël approche et une fois de plus je ne te verrai pas t’extasier devant les cadeaux présents sous le sapin. Noël approche et, pour la seconde fois, je me sens amputée d’une partie de moi-même. Noël est une fête, mais c’est aussi le jour où l’on s’aperçoit combien certaines personnes nous manquent. Seule, perdue dans mes pensées, je repense à la pire période de notre vie, celle de ta mort. Je revis chaque instant qui a suivi ce maudit jour du mardi 11 mai 2021. Je me sens coupable, coupable de t’abandonner, coupable de ne pas assumer mon rôle de maman comme je le fais pour tes trois frères. Je ne t’écris quasi plus dans mon journal. Mes visites au cimetière se font rares. La boule au ventre, je me suis installée sur le canapé de force et je te rédige ces quelques mots.

« Margaux, mon bébé d’amour, je ne t’oublie pas. Je suis présente pour les vivants mais ta place dans mon cœur est infiniment grande. Je voudrais pouvoir te consacrer tout mon temps mais je n’y parviens plus. Le tourbillon de la vie m’emporte avec lui. J’ai mal. Je culpabilise ».

T’écrire me tranquillise.  J’observe ta photo dans la boule de noël. Le sourire aux lèvres, tu illumines notre sapin. Margaux, ma chérie, fais-moi une place au fond de ta bulle. Retiens-moi. Tu es ma bulle d’oxygène qui m’empêche de suffoquer. Ces moments avec toi sont indispensables à ma survie.

« La vie, c’est comme une bulle de savon. Il suffit de souffler dessus pour qu’elle éclate. »

Auteur

norah.siegenthaler@bluewin.ch
Je m'appelle Norah Simon. Je suis née le 30 octobre 1989 à Lausanne. J'ai suivi une formation d'enseignante primaire à la Haute Ecole Pédagogique de Lausanne. J'ai toujours apprécié la lecture et l'écriture. Depuis le décès de ma fille, j'y ai trouvé un refuge, un moyen d'évacuer mon trop-plein d'émotions, un véritable exutoire.